YC Monaco

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L’écosystème du yachting monégasque réunit autour de la transition durable

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Le Cluster « Yachting Monaco » a tenu son rendez-vous annuel du Spring Pop-Up au Yacht Club de Monaco, réunissant les acteurs majeurs de l’industrie du yachting autour du thème central : la transition durable. Entre visites de yachts dans la YCM Marina et trois tables rondes thématiques, les échanges ont mis en lumière des solutions concrètes, des expériences de terrain et une volonté partagée d’agir. Cette édition a également marquée par la présence des nouveaux vice-présidents du Cluster : Arthur Bohr, Directeur du site de Monaco et Key Account Director chez Monaco Marine, et Olivier Lavagna, Directeur Général de la SEPM (Société d’Exploitation des Ports de Monaco), incarnant une nouvelle impulsion collective.

S’inspirer des secteurs voisins

La première table ronde, animée par Vincent Huens de Brouwer, a exploré les innovations durables développées dans des secteurs voisins : la croisière et le transport maritime. L’objectif : inspirer le yachting à sortir de son entre-soi en s’appuyant sur des initiatives déjà éprouvées.

 

Vianney Vautier (Directeur des Opérations – Orient Express, Groupe Accor) a présenté l’approche environnementale de l’Orient Express Corinthian, le plus grand voilier du monde (220 mètres) pour des croisières premium. Après avoir rappelé que « le meilleur carburant est celui qu’on ne brûle pas », il a détaillé chaque aspect du navire : de sa carène à ses systèmes de gestion énergétique, l’utilisation de voiles rigides. Tout a été optimisé pour minimiser l’impact environnemental. « Le navire est équipé de 6 000 capteurs. Grâce à un jumeau numérique, nous simulons chaque itinéraire pour identifier les écarts de consommation, puis les corriger. »

 

Victor Gibon (Chef de projets – JIFMAR GROUP Canopée) est revenu sur l’expérience du cargo Canopée, premier navire hybride à propulsion vélique rigide, conçu pour transporter les composants de la fusée Ariane 6 entre l’Europe et la Guyane. « Nous avons enregistré une réduction moyenne de 20 % de consommation de carburant sur l’Atlantique. Dans certaines conditions optimales, elle peut atteindre 50 %, voire 100 % en mode voile seul. »

Enfin Victor Collazos (V.ERDE – Gestionnaire du programme de décarbonisation) a présenté un état des lieux des réglementations environnementales en vigueur dans le transport maritime. « Le yachting représente aujourd’hui 0,3 % des émissions maritimes mondiales. Cela peut sembler faible, mais la régulation va inévitablement arriver. L’Europe impose désormais un système de notation énergétique (A à E) aux navires. »

Écouter les propriétaires

La deuxième discussion, modérée par l’architecte naval Espen Øino, a donné la parole aux armateurs.

 

Pour Laurent Reiss, (M/Y Asteria), l’aventure familiale est au cœur du projet : « Nous voulions explorer la planète et montrer le monde à nos enfants. » Naviguant depuis plusieurs années dans des zones reculées comme la Polynésie française, il insiste sur l’importance de concevoir un bateau adapté à ces environnements : autonomie, robustesse, équipements embarqués.

 

À l’inverse, Frank Binder (M/Y XEIA) regrette des designs trop standardisés : « Il faut des espaces à vivre réellement pensés pour la mer. » Heigo Paartalu (Directeur Général et co-fondateur de YachtWay – M/Y Vanquish VQ55 & VQ58), a quant à lui insisté sur la modularité à bord : « Chaque mètre carré doit être multifonction : un bain de soleil doit pouvoir se transformer, intégrer une cuisine extérieure, permettre de recevoir. » Tous convergent sur un défi majeur : la gestion de l’équipage. Il a également présenté YachtWay, une plateforme facilitant la sélection et l’achat de yachts parmi les 1800 marques existantes via un moteur de recherche où chaque critère est personnalisable et des visites 3D immersives.

 

Tous ont souligné un enjeu commun : la gestion de l’équipage : turnover élevé, rotations mal vécues, manque de fidélisation : autant de freins à une navigation sereine. Les exemples partagés illustrent un déséquilibre : « Le système de rotation est une fausse bonne idée. C’est pratique pour le marin, pas pour le propriétaire » estime Laurent Reiss.

Refit durable, levier de transformation

La troisième et dernière table ronde, modérée par David Seal, a abordé des actions concrètes pour rendre la flotte existante plus durable, sans transformation lourde ni contraintes dissuasives pour les propriétaires. Robin Savigny (Chef de projet efficacité énergétique SMEG / SMART+), a démontré qu’un simple dispositif de mesure peut générer 24 % d’économies électriques sur un yacht de 60 m, soit 48 000 € par an.

 

Arthur Bohr, Directeur du site de Monaco chez Monaco Marine, a rappelé que 70 % de la flotte mondiale a plus de 10 ans, et que chaque yacht mérite un plan de transition sur mesure. Le remplacement des groupes électrogènes, l’intégration de batteries tampon pour absorber les pics de charge, ou encore le renouvellement des systèmes de climatisation, souvent très énergivores, sont des leviers immédiats. « En changeant simplement 520 ampoules halogènes par des LED sur un yacht de 50 mètres, on économise jusqu’à 57 000 litres de fuel par an », a-t-il illustré.

Natalie Quévert (Secrétaire Générale et Chef de Projet SEA Index®), a rappelé l’importance de disposer de données fiables pour engager une transformation efficace. Créé en 2020 par le Y.C.M. en collaboration avec Credit Suisse (marque du groupe UBS), le SEA Index® est un outil de référence permettant d’évaluer les émissions de CO2 des yachts de plus de 24 mètres. « Notre certification CO₂ permet aux armateurs de situer leur yacht sur une échelle d’intensité énergétique. Un point de départ essentiel pour hiérarchiser les actions à engager. » Elle souligne que l’ancienneté d’un yacht n’est pas nécessairement un handicap : « Certains bateaux plus anciens, bien conçus et équilibrés, obtiennent de très bons scores. À l’inverse, des unités récentes ou hybrides peuvent parfois surprendre par leur impact. »  

 

Les panélistes soulignent la pression croissante des régulations et des attentes sociétales, notamment des jeunes. Arthur Bohr évoque un propriétaire de yacht de 70 m interpellé par le refus de ses petits-enfants d’embarquer, en raison de l’impact environnemental du yacht. Enfin, les intervenants saluent l’apport des nouvelles technologies et de l’intelligence artificielle pour affiner les diagnostics énergétiques. Robin Savigny conclut : « On ne peut pas améliorer ce qu’on ne mesure pas. La première étape, c’est d’avoir une visibilité claire sur la consommation réelle du navire ».

Une offre diversifiée

Parallèlement aux discussions, seize yachts de 12 à 52 mètres étaient accessibles à la visite, sur les quais de la YCM Marina, présentés par des courtiers membres du Cluster tels que Edmiston, Espen Øino, Ocean Independence, Sanlorenzo, Azimut Yachts ou BehneMar. Reflétant la vitalité du marché ces unités offrent un aperçu concret de l’offre actuelle, entre design, performance et débuts de transition écologique, bien que tous n’intègrent pas encore de solutions durables.

Une dynamique collective pour une croissance durable

Fédérant près de 100 entreprises de toute la chaîne de valeur, le Cluster « Yachting Monaco » s’affirme comme une plateforme stratégique pour accompagner la transformation du secteur. Son ambition : stimuler l’innovation, encourager les synergies et ancrer le yachting dans une croissance plus durable en Principauté. En 2022, l’industrie du yachting représentait à Monaco un chiffre d’affaires de 567 millions d’euros – soit 3 % du total de la Principauté – avec 411 entreprises et 1 429 emplois à terre.