10e Symposium Environnemental « La Belle Classe Superyachts »

 

Dans le cadre de la Monaco Ocean Week (22-27 mars 2021), le Yacht Club de Monaco était en charge du volet Yachting de cette semaine, organisée par la Fondation Prince Albert II, le Gouvernement Princier, en collaboration avec l’Institut océanographique de Monaco et le Centre Scientifique de Monaco et dont l’objectif est d’approfondir la réflexion sur la conservation du milieu marin.

Ainsi, le Y.C.M. a organisé la 10ème édition de son symposium environnemental La Belle Classe Superyachts, un rendez-vous dédié aux armateurs et capitaines, qui permet de les tenir informés de l’actualité du Yachting et de fédérer tous les acteurs du secteur. Le Y.C.M. se veut être un carrefour où la parole et les échanges sont essentiels. Cette année, en raison du contexte sanitaire international, un tout nouveau format était proposé, associant une journée entière de conférences et de débats animés tant en présentiel qu’en distanciel. Six personnalités, qui font référence dans leur domaine, parmi lesquelles l’explorateur Mike Horn, le journaliste Guillaume Pitron…, sont ainsi venues partager leur expérience et leur expertise autour de la thématique « Nouvelles énergies et émissions carbone : le yachting tourné vers l’avenir ».

 

© Mesi / Yacht Club de Monaco

L’hydrogène, une énergie d’avenir

Réelle opportunité pour accélérer la transition énergétique, l’hydrogène est un des leviers de la neutralité carbone. Cette énergie fait partie des solutions d’avenir pour notre planète et pour la population mondiale dont 70% habitent le long des côtes. « 25% de la population mondiale dépend de la pêche océanique, 25% des espèces animales et végétales pourraient disparaître d’ici 40 ans, 30% de la biodiversité marine vit dans les coraux, en 2050, tous les coraux pourraient être morts (le phénomène s’accélère)» note Jérémie Lagarrigue, Directeur Général d’EODev (Energy Explorer Developments). Et de poursuivre : « l’hydrogène est présenté comme le seul système énergétique capable de répondre aux exigences réglementaires et permettant de continuer à assurer les activités économiques ». Inépuisable, présentant une haute densité énergétique, considéré comme le meilleur allié des énergies renouvelables, offrant un ravitaillement rapide, propre, silencieux et léger (…) les avantages de l’hydrogène ne sont plus à démontrer. Le chiffre d’affaires engrangé est colossal et « cela va aller en s’améliorant » explique Jérémie Lagarrigue « en 2017, l’hydrogène pesait 2 milliards de dollars, on table sur 2500 milliards de dollars en 2050 et 30 millions d’emplois créés ».

 

Les professionnels donnent par ailleurs leur chance à l’hydrogène vert, en témoigne les chantiers de refit de la Ciotat avec l’intervention de Jean-Yves Saussol, Directeur Général des chantiers navals de la Ciotat. La construction de la nouvelle plateforme de 40 000 mètres carrés comprenant des équipements de mise à l’eau d’une capacité de près de 5 000 tonnes, destinés au refit des super-yachts, répond aux exigences environnementales. En décembre 2020, un appel à projet a été lancé dont le lauréat est Hynova Yacht, la première marque de bateau de plaisance au monde à sortir avec une propulsion électro-hydrogène.

 


© Mesi / Yacht Club de Monaco

 

L’hydrogène en mer

Le développement de l’hydrogène est-il in fine, une solution au service du Yachting ? Oui à en croire le nombre croissant de projets d’unités bénéficiant de cette énergie, qu’elles soient à voile ou à moteur. Quelques exemples : Samana 59 de Fountaine Pajot, le 60 m Orcageno, Aquon One, The New Era, le 40 pieds d’Hynova Yacht jusqu’au projet hydrogène Viking, un rétrofit de Sunseeker de 29 mètres sans oublier Pangaea (35 mètres), le voilier d’expédition de Mike Horn. « Hydrogène, batteries, solaire, éolien, hydro-électricité, nous testons toutes ces technologies dans des conditions extrêmes pour être appliquées à grande échelle » explique Victorien Erussard, Président, capitaine et fondateur d’Energy Explorer, un catamaran alimenté uniquement par des énergies renouvelables et utilisant l’hydrogène comme moyen de stockage des énergies. « Nous avons à bord un compresseur à deux étages : 180 bars et 350 bars qui nous permet de minimiser le volume de stockage de l’hydrogène » précise Victorien Erussard « Energy Observer possède également huit réservoirs de 332 litres pouvant stocker un total de 62 kg d’hydrogène ».

Sa pile à combustible convertit également l’hydrogène en électricité et en chaleur. Mais les objectifs sont bien plus grands encore « Développer, consolider notre expertise dans le domaine de la transition énergétique durable, qu’il s’agisse des impacts économiques, environnementaux et sociétaux, ou des évolutions en cours, technologiques comme sur le plan des usages » note le capitaine.

 

De son côté, l’explorateur Mike Horn a élaboré un projet d’équipement pour son voilier d’expédition Pangaea en technologie hydrogène. Fort de son expérience de la situation environnementale tout autant que des besoins de puissance pour une mobilité entièrement décarbonée, il a contribué au développement par le CEA-Liten, d’une nouvelle génération de pile à combustible de 300kW minimum qui viendra équiper son voilier. Un dispositif qu’il teste dès à présent lors de compétitions automobiles avant d’affronter les conditions extrêmes avec Pangaea. Le sociétaire du Y.C.M. a insisté sur la nécessité de franchir le cap des investissements massifs à faire pour permettre le déploiement des infrastructures hydrogène, en particulier pour la production et la distribution d’hydrogène vert produit à partir d’énergies renouvelables. Il a rappelé que la plaisance et la grande plaisance avaient un rôle majeur à jouer dans la transformation des usages et l’éradication de l’utilisation d’énergies fossiles. L’hydrogène restera au cœur des discussions lors du 8e Monaco Energy Boat Challenge (6-10 juillet 2021) avec 8 équipes qui ont déjà annoncé favoriser cette solution énergétique dans leur projet.

 

© Mesi / Yacht Club de Monaco

 

L’impact environnemental des super-yachts passé à la loupe

Sous l’égide du projet « Monaco, Capitale du Yachting », initié par le Yacht Club de Monaco et qui a pour ambition de faire de la Principauté un pôle d’excellence et d’innovation dans le domaine de la grande plaisance, le Y.C.M., en collaboration avec Credit Suisse, a créé le « SEA Index ». Ce référentiel s’adresse aux propriétaires de yachts de plus de 40 mètres pour évaluer les émissions de CO2 et améliorer leurs performances environnementales. Déjà opérationnel et disponible en ligne, cet outil sur-mesure a pour ambition d’informer sur les meilleures pratiques via l’attribution d’un classement de normes écologiques. Évolutif et collaboratif, le « SEA Index » a pour objectif de s’étendre à d’autres domaines et devenir ainsi un indice de durabilité multi-facettes, couvrant également les systèmes de propulsion, la récupération d’énergie, les produits chimiques, les déchets et l’eau.

S.A.S. le Prince Albert II, Président du Y.C.M. a officiellement intronisé les armateurs du M/Y Ragnar (68 m) et du S/Y Maltese Falcon (90 m) qui viennent d’adhérer à la démarche. Il a également été annoncé que les certificats du Sea Index seront délivrée par Lloyd’s Register. « Une vraie reconnaissance de la part de cet organisme reconnu internationalement » selon Michel Buffat, Head of Aviation & Yacht Finance, Credit Suisse.

Mesurer l’impact environnemental des super-yachts, telle est l’ambition partagée par Water Evolution qui, à travers le YETI Tool, a la possibilité d’examiner le cycle de vie d’un yacht. Pour Robert Van Tool, Directeur Exécutif de Water Evolution, il était « nécessaire de mettre en place un mécanisme de reconnaissance qui récompense des choix plus respectueux de l’environnement ». Un outil au service de l’industrie du Yachting, toujours en cours de développement, qui devrait permettre non seulement d’améliorer la connaissance des différentes énergies utilisées selon les différents types de yachts mais aussi l’efficacité des méthodes de calcul des émissions de CO2 ou encore de mesurer l’impact environnemental.

 

Le yachting au cœur des débats

Propulsions électriques, Greentech et métaux rares : quelle transition énergétique pour le Yachting ? Une question bien vaste à laquelle le journaliste et réalisateur français Guillaume Pitron a essayé de répondre. Pour ce spécialiste de la géopolitique des matières premières, il faut avoir en tête que le transport est l’un des secteurs les plus visés par cette révolution technologique, puisqu’il représente, selon les pays, entre 15 et 25% des émissions de GES. « Cette transition qu’il faut impérativement mener, doit être enrichie de préconisations : connaissance de la vérité écologique des technologies, sourcing éthique des minerais, diplomatie minérale, économie circulaire… La plaisance, elle, représente 1% des émissions de GES du secteur maritime. La pollution que représente la navigation intérieure (y compris la plaisance) par an est conséquente : 110 millions de tonnes de Co2 ». L’industrie du yachting est un secteur économique jusque-là relativement protégé par les réglementations « vertes » (au contraire du fret, par exemple) mais qui est « de plus en plus invité à effectuer sa transition énergétique notamment en respectant les réglementations internationales visant à ce que le secteur du transport n’émette plus de carbone à l’horizon 2050. C’est un basculement inévitable qu’il faut anticiper dès à présent » poursuit le réalisateur. Pour ce faire, plusieurs solutions sont envisagées et envisageables : utiliser des moteurs thermiques avec de nouveaux carburants (biofuels, gaz naturels, algofuels, bioéthanol) ou des moteurs 100% électriques ou des piles à hydrogène. « Si toutes ces pistes ont chacune leurs inconvénients, la somme de leurs avantages est indéniable ».

 

© Martin Keruzoré / Team Malizia

 

Les rencontres se poursuivent aujourd’hui vendredi à 16h30 avec une conférence grand public en distanciel qui sera animée par Boris Herrmann et Pierre Casiraghi, vice-président du Yacht Club de Monaco et Fondateur de la Team Malizia, qui viendront dresser un bilan global de ce premier Vendée Globe, sous les couleurs de la Principauté et présenter les premières données scientifiques (émissions de CO2) du laboratoire embarqué à bord de Seaexplorer-Yacht Club de Monaco.