Expédition Sir Ernst

 

Mardi 5 octobre , cela avait commencé la veille déjà…Ce sentiment mitigé entre la nostalgie sachant que oui, dés demain, la plénitude du grand large allait nous quitter, que cette vie  rythmée par les quarts et si proche des éléments naturels allait bientôt céder la place au plaisir de la découverte mais aussi aux contraintes du retour à terre, elles-mêmes déjà bien connues de tous !

Mais déjà, après le dernier quart passé sous la protection d’Orion par une magnifique nuit douce et étoilée, il faut se rendre à l’évidence : nous sommes passés sous la barre des cents derniers milles dans la nuit, et l’atterissage est bien prévu en fin de journée, si le vent ne faiblit pas et que nous réussissons à maintenir une vitesse proche des 7 noeuds. Les milles s’égrennent les uns après les autres au rythme des heures qui passent, et nous nous employons à optimiser le réglage du  bateau ainsi que la trajectoire en fonction des prévisions de vent données par les cartes météos afin d’arriver avant la nuit, qui étend son voile assez rapidement sous ces latitudes.

Et c’est en fin d’après-midi que les plus  hauts sommets (près de 2 000 mètres !)de Sào Antào, île voisine de notre destination finale, l’ïle de Sao Vincente, se dessinent dans notre avant, sous notre génois  bien gonflé par un vent qui ne mollit pas, au contraire ! L’esquisse initiale de ces lignes de crêtes d’origine volcanique,dont l’apparence n’est pas sans rappeler celles de Moorea, laisse place à un paysage minéral fort et contrasté, composé de hautes falaises abruptes de couleur sombres malgré la chaude lumière de fin de journée. La mer devient plus grosse au fur et à mesure de notre approche de l’île et de son phare qui annonce l’entrée de la baie de Mindelo, notre destination finale, les fonds remontant assez rapidement et le vent subissant des variations de direction et d’intensité au fur eet à mesure de notre approche. Mais la partie n’est pas encore jouée, et l’attention du barreur et de l’équipage est grande, car des  marmites de courant a  pparaissent ça et là, la mer devient grosse en approche finale, et le vent ne mollit toujours pas. L’observation du fond de la baie de Mindelo, sorte de grande caldeira, laisse apparaitre la digue du port marchand et le scintillement des lumières de la ville, ainsi qu’un plan d’eau finalement appaisé car protégé par un cirque montagneux. Le moment d’affaler est venu, et nous nous dirigeons vers un quai quasi désert de la marina qui nous accueille. C’est attablés au Club nautique que nous finirons la journée, avant de retrouver nos couchettes, la tête encore pleine de ces merveilleux moments passés tout au long de ces quelques 850 milles parcourus entièrement à la voile, conscients  et reconnaissants de la chance que nous avons eue de pouvoir les vivre !