26e Captains’ Forum | Jeudi 29 septembre 2022

 

Dans le cadre de « Monaco Capital of Advanced Yachting », le Yacht Club de Monaco continue de mettre à l’honneur la grande plaisance et ses acteurs. Au lendemain du déjeuner des armateurs, rendez-vous traditionnel qui a réuni cette année 90 convives, ce fut au tour des capitaines de super-yachts d’être sur le devant de la scène pour le 26e Captains’ Forum. Ce rendez-vous s’inscrit dans le cadre du Captains’ Club qui fédère 150 capitaines détenteurs d’un brevet de capitaine 3000 exerçant sur des super-yachts et naviguant sous pavillon du Y.C.M.

Plus d’une centaine de ces professionnels avaient répondu présents à cet évènement organisé en collaboration avec Jutheau Husson et Oceanco. MB92 Group a souhaité rejoindre ces deux derniers au sein de ce Captains’ Club international avec la volonté de renforcer sa collaboration avec le Y.C.M. et ainsi accentuer le networking et le lien avec ces professionnels qui jouent un rôle clé et central dans la chaîne du yachting. Pour cette nouvelle édition, le Captains’ Forum a décidé de sortir des sentiers battus, donnant de la hauteur au débat.

 

La mer vue du ciel

« Monaco est la capitale du yachting, au même titre que Huston l’est pour les missions spatiales » a débuté Scott E. Parazynski, invité exceptionnel de l’évènement. Cet ancien astronaute de la NASA, dont le parcours a de quoi laisser pantois, a marqué cette matinée d’échanges non seulement en évoquant son vécu mais en établissant également les nombreuses similitudes entre ces deux mondes. « Aller dans l’espace requiert une certaine préparation. Cela nécessite une juste balance. Il faut être profondément calme tout en étant extrêmement concentré. C’est certainement aussi le cas pour vous capitaines, lorsque vous prenez la mer. » Le facteur humain est également une pièce maîtresse du rouage « lors des missions spatiales, les équipages pluridisciplinaires proviennent d’horizons différents, ont des opinions différentes mais doivent mener conjointement une mission et régler les problèmes ensemble ». A l’image d’un équipage de super-yachts, l’élément humain porte les missions, qu’elles soient spatiales ou maritimes. Loin d’être avare en anecdotes, Scott E. Parazynski a contribué a capté l’auditoire de bout en bout « et comme vous je présume, lorsque l’on revient sur terre, l’on se demande quand est-ce que l’on va repartir. »

 

La nouvelle génération détermine la formation

« Il faut savoir qui ils sont, et il faut imaginer ce qu’ils vont devenir » note Luca Triggiani, capitaine du M/Y Roe (74m). Les temps changent et les profils des futurs marins aussi. Il est aujourd’hui question de s’adapter aux Millennials. « Ils sont moins patients » poursuit Luca Triggiani, « c’est à nous de les aider à trouver leurs atouts et les développer. » Car beaucoup quittent l’industrie sans même avoir persévéré « il faut leur donner l’opportunité de grandir » complète Craig Coker, capitaine du M/Y Skyfall (58m). Tous s’accordent à dire qu’il leur faut un objectif et pas seulement un process à suivre. « Il ne faut pas oublier que l’on forme également les managers de demain » note Dan Smith, M/Y Savannah (84m).

La nouvelle génération a des attentes et des besoins qui diffèrent de leurs ainés « ils veulent rester connecter à leur chez eux. Je me rappelle ma première grande navigation. J’ai appelé ma mère une seule fois en quatre mois » se souvient Barry Sadler, Chartered Master Mariner and Senior Lecturer LBCA. L’industrie doit donc offrir plus et reconnaître le potentiel du candidat en l’incitant à s’améliorer. Si les futurs équipages ont besoin d’objectif concrets, il n’en reste pas moins à l’écoute des préoccupations actuelles « je pense que ce sont eux qui nous éduquent dans le sens où ils sont préoccupés par les questions environnementales » poursuit Dan Smith. Ils sont à même de dire ce qui leur paraît cohérent et ce qu’il ne l’est pas.

 

La machine soutient l’humain dans le succès

L’humain comme la machine nécessite une constante adaptation. « L’innovation est le mot clé et pour construire l’avenir, il nous faut des gens courageux, que ce soient des armateurs, des chantiers navals, des architectes (…) » commente Luca Mosca, capitaine du M/Y Quantum Blue (104m). « Les visionnaires sont prêts à changer les règles que ce soit en matière d’écologie, d’efficacité du navire, d’utilisation des nouveaux matériaux (…). Tout va changer dans les prochaines années et tout le monde le sait. »

Loin d’en être un substitut, la technologie sera toujours complémentaire de l’humain « je ne pense pas que l’on puisse remplacer le facteur humain à bord » précise Matteo Morra, Area Sales Manager for Wärtsilä, Italy. « Je vois le capitaine comme un chef d’un restaurant étoilé. L’interaction avec le client est essentielle. »
Pourtant, si le futur se doit d’être vertueux, certaines questions restent encore en suspens. Seulement 5% des yacht qui apparaissent dans les carnets de commandes, sont qualifiés d’innovants. La majorité possède encore des systèmes de propulsion conventionnels. « Il faut améliorer nos standards » ajoute Armelle Roudaut-Lafon, Directrice des Affaires Maritimes de Monaco, « nous n’avons pas d’autre choix que d’aller dans ce sens. Et vous les capitaines, vous êtes notre lien pour s’assurer que la règlementation est respectée à bord. »
Tout le monde est concerné par le changement et pour l’opérer, il faut qu’il y ait une cohérence entre les yachts en construction et les nouvelles infrastructures. « Vous pouvez avoir toute la technologie que vous le souhaitez à bord, mais la complexité est aussi de trouver des personnes capables de l’utiliser » poursuit Snorre Halvorsen, Senior Executive Advisor for NorwegianHull Club Risk.

 

« Travailler dans cette industrie nous incombe d’un devoir : celui de l’améliorer » concède Dan Smith. « C’est important de préserver l’environnement pour la nouvelle génération. L’industrie dans les 20 prochaines années, va selon moi souffrir d’une grosse pression des nations unies qui va imposer des restrictions sur les émissions de carbone. Il faut donc relever le défi dès aujourd’hui. »

Un seul moyen pour parvenir à regarder dans la même direction : faciliter les échanges entre les clients, les armateurs, les chantiers, architectes et designers pour qu’ils travaillent ensemble sur de nouvelles idées innovantes. « Je pense que dans les prochaines années, nous aurons trouvé une alternative au carburant que l’on utilise actuellement. Il va donc falloir développer une technologie pour produire moins d’émissions carbones » précise à son tour Barry Sadler. « D’un point de vue durabilité, l’industrie est en train de tendre vers une responsabilité sociale pour tenter de répondre au réchauffement climatique. »

 

Le Yacht Club de Monaco ouvrira de nouveau ses portes à l’industrie du yachting à l’occasion de la prochaine Monaco Ocean Week avec la première édition du Monaco Smart and Sustainable Yacht Rendezvous qui se tiendra le 24 mars 2023 et dont l’ambition est justement de faire la lumière sur les innovations éco-responsables autour des navires.
En cette journée mondiale de la mer, les capitaines, qui sont les témoins au quotidien du changement climatique et de l’état des océans, rappellent une nouvelle fois l’importance de se mobiliser et de trouver des actions concrètes pour la sauvegarde des océans.