Expédition Sir Ernst
Nous avons passé aujourd’hui les 45èmes Sud et ressentons pour la première fois le climat Patagon.
La nuit dernière, le vent de Sud qui a atteint 35 nœuds nous a peu chahuté, le temps de prendre le second ris et troquer notre génois pour la trinquette. Ensuite, il a molli le reste de la journée pour tourner au Nord le soir. Ce qui nous permet de continuer notre route à une meilleure vitesse.
L’air s’est nettement rafraichi et nous sortons polaires et bonnets. Plus on avance vers le sud, plus les journées s’allongent. Le jour pointe entre 4 et 5 heures et le crépuscule s’étale jusque vers 22 h.
Les albatros et pétrels sont au rendez-vous. Ils nous escortent depuis ce matin en bandes organisées. Maitres dans le vol dynamique, ils exploitent à merveille le gradient de vent (accélération du vent avec les premiers mètres d’altitude) combinée à la houle. Ils volent sans jamais battre des ailes, en suivant des trajectoires caractéristiques : plongent au ras des vagues vent arrière, effleurant la surface du bout de leur aile intérieure au virage puis après une courbe parfaite, reprennent de la hauteur face au vent et replongent à nouveau. Ils évoluent souvent seuls dans leur trajectoire mais volent aussi parfois de concert, aile dans aile. Leur technique de vol et les courbes qu’ils dessinent en forme de huit les conduisent à sans cesse à approcher le bateau et s’en éloigner à nouveau puis revenir et ainsi de suite. On ne se lasse pas d’admirer leur majestueux balais autour de Sir Ernst. Nous sommes fascinés par leur agilité à jouer avec les ondulations de la grande houle atlantique sur laquelle ils jouent à disparaitre de nos yeux pendant de longs instants pour mieux en ressurgir avec toujours autant de grâce.
Toujours au large, comment vivent-ils ? Comment se reposent-ils ? Cette adaptation au milieu marin nous interroge, nous humains qui avons besoin de tant de moyens matériels et d’assistance pour simplement naviguer sur la mer. Le spectacle de leur ballet est en parfaite harmonie avec les reflets du soleil et des nuages sur les crêtes effrangées des vagues.
Cette nuit le vent remonte au-delà des 30 nœuds mais de Nord cette fois. Il nous accompagne. Pour la première fois nous fermons la porte du « Dog-House » car pendant la veille ; il commence à faire frisquet.
Mercredi 12 janvier.
François a passé le 3e ris aux aurores lorsque le vent de nord a dépassé les 40 nœuds.
A 8 heures, je me lève pour mon quart. Le vent souffle maintenant à 25 nœuds au 310°. Nous naviguons plus calmement au largue. Quel plaisir d’être accueilli par le bol de café chaud et le petit déjeuner préparé par Hervé, qui lui termine son quart. Sur Sir Ernst, le petit déjeuner est un moment convivial qui permet de parler des manœuvres de la nuit, de la météo et du programme des prochaines heures.
Fabrice, Pierre-Etienne
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